Les oiseaux s’emmêlent les plumes !

Les oiseaux s’emmêlent les plumes !

Moi je construis des jardins… avec de la ficelle et de vraies plantes.

A
lors sans nouvelles de mes belles végétales pendant deux mois de réclusion, je scrutais le ciel qui s’ouvrait, débarrassé de la nuée des poussières. Au lieu de particules cosmiques et pendant deux mois à résister à toutes les tentations festives, je scrutais, je scrutais. Pas un seul aéroplane, pas un seul élément venu du monde habituel. Mais des oiseaux, des oiseaux des oiseaux,…de tout poil, pardon, de toute couleur. Tantôt un bal de mésanges, la charbonnière, la bleue, la huppée, tantôt des pinsons, tantôt des merles, puis des migrateurs, la huppe fasciée, les rouges-gorges, les premières grives puis le grand corbeau. En Méditerranée, l’avifaune (le monde des oiseaux), est un mélange de couleurs, de chants, de manies, de vols, de nids, de plumes. J’étais confiné, que dis-je ? nous étions confiné.e.s et les oiseaux s’en donnaient à cœur plumes. Ils cohabitaient quand leurs territoires d’hier les avaient confinés et déconfits à se tirer la queue ou le bec pour écarter tout autre volatile venu glaner ici des graines, là des pucerons et bien d’autres mets si précieux en leurs temps nuptiaux. Les nids fleurissaient. Leurs chants se faisaient de plus en plus gracieux, plus amples et sans fréquence journalière. A voir même leur instinct grégaire revenu, on aurait pu croire à des oiseaux de basse-cour en mode haute-voltige. Approcher un merle eût été un challenge digne de la LPO et pourtant dans les zones de confort qu’ils s’étaient appropriés, la mésange piaillait et nous regardait. Le merle nous montrait son derrière comme pour nous narguer. Et tout cela à quelques mètres alors que quelques semaines auparavant, il eût fallu surprendre sur une branche l’envol irrité de n’importe quel oiseau pour se dire que les airs étaient encore habités… L’effet COVID avait du bon pour ces passereaux. Ils reprenaient leurs corridors écologiques.

Que je n’aime pas ce mot…

Comme s’il fallait inventer une rhétorique pour dire plus simplement que leur place d’oiseaux est omniprésente dans les écosystèmes de toute nature.

Pourquoi pas des couloirs aériens aussi, non ?

Et puis, et puis… et cui, la beauté se cueillait à plume raccourcie. Le bruit n’était plus homme, il était nature presque sauvage. Les rossignols ont commencé à arriver, à leur tour. Ils ont quelque peu perturbé la royale joute des autres. Mais plus nocturnes, ils se sont fait une place, sans embrouille, calmement. C’était le 10 mai. Nous étions confinés. Les oiseaux avaient compris que nous n’étions plus prioritaires, à droite comme à gauche.

Puis nous avons été déconfinés. Ce matin-là sur Marseille la circulation sur les rocades a repris, les artères ont regonflé, de gens, de pétrolettes, de brouhaha. Même si c’était timide, le jour venu d’avant pour après rugissait. Les gabians (Goélands pour ceux qui voudraient) tournoyaient dans le ciel de la Bonne Mère. Eux, qui avaient pris leur aise, grands seigneurs entre terre et mer, ont tournoyé, viré comme des moutons lourds. De là où ils étaient visibles, leur désorientation prenait des allures de cirque pathétique. Ils avaient préparé leur nid, ils s’étaient fabriqués des périmètres réservés. Pas touche à mon nid, pas touche à mes œufs semblaient pleurer leurs chants désespérés. Ils étaient de nouveau contraint d’errer et migrer de corridors en corridors, de placette en platane, de toits en terrasses. La nature avait repris ses allures anthropiques et le fond sonore, les ondes magnétiques recalibrés une vie électrique et psychédélique. Nous étions ainsi déconfinés à voir voler les oiseaux, désormais trop loin de nos jours d’avant si volages.