Réforme de l’assurance chômage : un pas de plus dans l’univers de Ken Loach

Réforme de l’assurance chômage : un pas de plus dans l’univers de Ken Loach

Pour savoir ce qui nous attend, il suffit de se plonger dans les films du réalisateur anglais, qui nous montrent l’évolution de la société anglaise depuis l’arrivée de Mme Thatcher et l’application de sa politique néolibérale. La brutalité de ses réformes a plongé de nombreux anglais dans la pauvreté et la précarité.

E
n France, sans retenue, depuis des années, les réformes se succèdent : visant à précariser les salariés, rendre invisible la pauvreté, discréditer les organisations syndicales et conforter les possédants.

Malgré un discours feutré et riche en euphémismes, la modernisation de la société que propose ce gouvernement n’est en fait qu’un brutal retour en arrière au niveau social.

Ce furent tout d’abord les attaques contre les travailleurs par les réformes du code du travail (loi El Khomri et ordonnances Macron) qui visaient essentiellement à faciliter les licenciements, soi-disant pour faciliter les embauches. Qui peut croire qu’en fragilisant le statut des salariés et en facilitant leurs licenciements on ira vers une baisse du chômage ?

Ce fut la réforme de la santé au travail qui sous prétexte de pénurie médicale (pénurie organisée) a entériné une très forte augmentation du nombre de salariés suivis par chaque médecin du travail. Le médecin du travail étant paradoxalement réduit à gérer les urgences, alors que son rôle est exclusivement préventif. Comme le souligne Marie Pezé, docteur en psychologie : « Avec les lois travail, on finit d’achever la médecine du travail. Il n’y aura plus désormais qu’une visite médicale des salariés tous les cinq ans. On supprime aussi les CHSCT. Alors que la souffrance augmente, on enlève encore des moyens à ceux qui pourraient jouer les tampons contre la violence sociale dans les entreprises. En supprimant les acteurs témoins de cette souffrance au travail, on est en train de construire son invisibilité ».

Maintenant il s’attaque aux chômeurs et non pas au chômage. Cette réforme va exclure des centaines de milliers de chômeurs des chiffres officiels et de l‘indemnisation, et les pousser vers la précarité et la pauvreté.

Comme l’a clairement dit Mme Pénicaud lors de la présentation de sa réforme le 19 juin, dans un lapsus révélateur : « Il s’agit d’une réforme résolument orientée vers le travail, vers l’emploi, contre le chômage et POUR la précarité ».

Mais cette réforme fait des remous, et pour la première fois depuis longtemps toutes les organisations syndicales salariées s’y opposent.

Pour Laurent Berger de la CFDT : « Le gouvernement, lorsqu’il dit que [cette réforme], c’est pour lutter contre la précarité, c’est un mensonge : c’est pour lutter contre les précaires ».

Avec ces dispositions « iniques », « inefficaces », « économiquement irresponsables », « moins d’un[chômeur sur trois sera indemnisé demain », déclare Catherine Perret, de la CGT.

« C’est un jour funeste pour l’assurance-chômage », pour François Hommeril, président de la CFE-CGC.

Eric Courpotin de la CFTC dénonce une logique où : « les demandeurs d’emploi sont considérés comme une variable d’ajustement financière ».

Et c’est bien le cœur du problème, le gouvernement ayant exigé unilatéralement une économie de 3 milliards sur le dos de l’assurance chômage.

Alors que seulement 44 % des inscrits à Pôle emploi perçoivent une indemnisation, les règles pour l’obtention des droits au chômage vont se durcir et ils seront encore moins nombreux à être indemnisés.

La durée d’activité pour être indemnisé passera de 4 à 6 mois dans les 24 derniers mois (au lieu de 28 mois). La reprise d’un emploi de courte durée durant la période de chômage ne permettra de retrouver une indemnisation que si elle est supérieure à 6 mois. Et le montant des indemnités va baisser.

Pour le moment la mobilisation est faible et se fait en ordre dispersé. D’un côté CFDT, CFTC, CGC et La FAGE n’ont rassemblé que quelques centaines de personnes à Paris, et la CGT idem.

Quelles vont être les ripostes sociales, syndicales et politiques face à cette nouvelle réforme/régression ?

Le gouvernement réussira t-il à passer en force ? L’enjeu est majeur. Si l’unité ne se fait pas, le gouvernement aura un boulevard pour engager la réforme/régression des retraites.

Combien de “Daniel Blake” dans la future Macronie ?

 

Moi Daniel Blake, réalisateur Ken Loach:
https://www.avoir-alire.com/moi-daniel-blake-la-critique-du-film

Pour mieux comprendre la réforme :
https://www.alternatives-economiques.fr/lassurance-chomage-nest-crise/00089714